Deux messages importants : « Déclaration pour le Jubilé de fraternité à venir » et « Faire la volonté de notre Père céleste »

En décembre 2015, avant Hanoukka et Noël deux déclarations extrêmement encourageantes et réjouissantes viennent d’être publiées de la part de Juifs à l’adresse des chrétiens (à lire et télécharger en bas de l’article).

L’occasion en est la commémoration des 50 ans de la Déclaration Nostra Aetate de Vatican II, le 28 octobre 1965.

L’un de ces textes, signé de cinq personnalités juives françaises (Libéraux, Massorti et orthodoxes) le signifie explicitement : « Déclaration pour le jubilé à venir ». Le fait qu’il ait été présenté officiellement par le Grand Rabbin de France Haïm Korsia au Cardinal André Vingt-Trois et au Pasteur François Clavairoly en dit l’importance.

L’autre texte émane de vingt-cinq rabbins orthodoxes d’Israël, Europe et USA (« Faire la volonté de notre Père céleste : vers un partenariat entre Juifs et Chrétiens ») ; (onze autres rabbins se sont ajoutés, jusqu’à maintenant).

Les deux textes sont en accord profond quant à l’autre essentiel : ils reconnaissent le changement fondamental et « irrévocable » qui s’est opéré de la part des chrétiens à l’égard d’Israël au cours des cinquante dernières années : reconnaissance de l’alliance et de la vocation du peuple juif, condamnation de l’antisémitisme, reconnaissance de l’état d’Israël. Ils envisagent pour l’avenir une action commune entre Juifs et chrétiens au profit du monde, tout en maintenant la spécificité de chaque partenaire. 

Chaque ligne de ces textes a son poids que les chrétiens sont invités à recevoir avec attention, reconnaissance.
J’en souligne quelques traits :

 La « Déclaration pour le jubilé à venir », par Jean-François Bensahel, Philippe Haddad, Rivon Krygier, Raphy Marciano, Franklin Rausky, quoique motivée par le souvenir de Vatican II, s’adresse aussi aux protestants et mentionne des membres de l’Église orthodoxe. Ce nouveau regard des chrétiens sur leurs frères juifs témoigne « d’une capacité inaccoutumée à se remettre en cause et constitue un précédent à caractère exemplaire pour toutes les religions et convictions spirituelles de la planète ». 
Les deux voies, juive et chrétienne, « bien qu’irréductiblement singulières, sont complémentaires et convergentes » : voilà qui devrait aider à aborder la question disputée d’une « seule voie de salut » affirmée du côté catholique. 
Et pour illustrer cet accord à l’œuvre commune dans la distinction des vocations : « Nous, Juifs, y travaillons par l’étude de la Tora qui vise la transformation des cœurs et des esprits. Vous, Chrétiens, y travaillez par l’accueil du Verbe qui vous donne ce supplément d’être, d’élévation du cœur et de l’esprit » : devenir Tora, devenir Verbe, immense programme. 

 La « Déclaration du rabbinat orthodoxe sur le christianisme » affirme : « nous reconnaissons que le christianisme n’est ni un accident ni une erreur, mais le fruit d’une volonté divine et un don fait aux nations ». 

Les chrétiens doivent mesurer le poids de ces paroles après seulement quelques décennies d’une conversion chrétienne qui succèdent à des siècles de haine, d’ignorance et de persécutions. Les auteurs orthodoxes ont su trouver dans leur tradition des appuis à ce nouveau regard juif porté sur les chrétiens. 

Enfin, un nouveau jubilé s’ouvre : Juifs et chrétiens sont invités à « œuvrer avec ensemble, plus que jamais, main dans la main » pour offrir « l’histoire des hommes à un même horizon, celui de la fraternité universelle d’une humanité rassemblée autour du Dieu Un et Unique ». De leur côté, les orthodoxes invoquent l’Alliance qui offre aux Juifs et aux chrétiens « la mission commune de parfaire le monde, sous le regard souverain du Tout-Puissant ». 

Ces deux messages sont propres à émouvoir un cœur chrétien. 

Plus qu’un nouveau jubilé, une nouvelle ère s’ouvrirait-elle, après presque deux millénaires d’ignorance mutuelle, de rivalité, de haine et de persécutions ? Des deux côtés, tous ne sont pas encore entrés sans hésitation dans ce mouvement, les rabbins orthodoxes le reconnaissent. Mais une impulsion est donnée, une "synergie" nouvelle, qui doit renforcer chaque partie dans sa vocation propre pour l’accomplissement de l’œuvre commune au service du monde. Jusqu’à il y a peu de temps à l’aulne de l’histoire, Juifs et chrétiens ont poursuivi leur mission dans l’ignorance mutuelle et, trop souvent, la haine. La confiance nouvelle devrait être source d’un puissant dynamisme. Les chrétiens sauront sur quelles richesses s’appuyer pour porter la Parole jusqu’aux extrémités de la terre, les Juifs sauront où trouver les meilleurs soutiens et récepteurs de leur message. 

Ce mouvement de fond se produit de nos jours, alors que l’horizon est assombri par des nuées de mort et de haine et par un antisémitisme toujours présent. La petite lumière de Hanoukka, têtue et persévérante, ne viendrait-elle pas offrir de sa chaleur à l’étoile de Noël ? 

Jean Massonnet , Président AJCF Lyon, décembre 2015

Les deux textes à télécharger :

Déclaration pour le Jubilé de fraternité à venir

Déclaration de rabbins orthodoxes sur le christianisme ; Faire la volonté de Notre Père des cieux : Vers un partenariat entre juifs et chrétiens